Quand le carburant et l’électricité deviennent un luxe et la résignation, une vertu
Chers Maliens, apparemment, on a trouvé une nouvelle façon de se distraire ici : faire la queue pour du carburant. Oui, c’est bien ça. L’électricité commence à refaire surface, timidement, mais pendant ce temps, on jongle entre bidons vides et réservoirs affamés. C’est devenu notre routine, ce cirque quotidien. On dirait que la première leçon pour survivre ici, c’est d’apprendre à sourire devant une pompe à essence qui ne sert à rien.
« Qui fait le mal, il le fait à lui-même », dit Bouddha. En effet, nous avons changé de registre : fini le temps où nous craignions les politiciens, qu’ils soient Alpha, IBK ou A.T.T. Aujourd’hui, le seul parti au pouvoir semble être celui de l’acceptation. Résilience ou résignation ? On ne fait même plus la différence, car nous avons décidé de nous contenter de ce qu’ils nous donnent, aussi riquiqui que cela puisse être, et on dit merci. Nos “bienfaiteurs” du moment, c’est carrément les pompistes et distributeurs de carburant.
Bon, passons à quelque chose de plus “patriotique”, si on veut. La vie continue, hein. Comme on dit, « même au fond du trou, la tête doit rester haute ». Il faut embellir le déluge, saluer le commandant et faire preuve d’un patriotisme à toute épreuve. Ainsi, si on vous demande si tout va bien, répondez avec ferveur : « Oui, tout va bien, cher compatriote ! » Mais attention, celui qui oserait dire le contraire sera vite catalogué comme un « faso den jugu », un apatride.
Ah, la queue à la station-service, quel beau symbole de notre époque ! Pour moi, c’est devenu un pèlerinage, une quête spirituelle. Une demi-journée, voire une nuit entière, pour remplir un réservoir qui se vide aussi vite que nos espoirs. Mais après tout, nous sommes des champions de l’adaptation ! Nous avons appris à vivre dans l’incertitude, à faire de la résilience notre nouveau mantra. « Qui ne risque rien n’a rien », dit-on, mais à ce stade, on se demande si le risque en vaut vraiment la chandelle, ou plutôt le litre de carburant.
La vérité, c’est que ceux qui nous ont mis là, ils ont des armes. Nous, on a des mots, des statuts Facebook, des vidéos qui buzzent deux jours et puis plus rien. C’est tout ce qu’on a. On vit dans une époque paumée, où les intellectuels et les grandes voix se sont tus. À leur place, il ne reste que le silence, percé par des cris de détresse et des promesses qui n’engagent plus personne.
Alors, que va devenir le Mali, et que deviendrons-nous ? Peut-être qu’il ne nous reste plus qu’à rire de tout ça, de nous-mêmes surtout. Parce qu’après tout, comme le dit cet adage de François Rabelais , « il vaut mieux rire que pleurer ». Alors, rions ensemble, chers compatriotes, tout en espérant que demain, la pompe soit pleine, et notre résilience, à la hauteur de nos attentes.
Albadia DICKO
Kaloum Info N° 167 du jeudi 20 novembre 2025
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